WAGNER AU FESTSPIELHAUS DE FÜSSEN
Le Festspielhaus de Füssen conçu par l'architecte Josephine Barbarino, a été construit à la fin du XXème siècle sur un terrain spécialement aménagé sur la rive ouest du Forgensee, face au château de Neuschwanstein qui domine l'autre rive du lac. Il était destiné à recevoir un spectacle de comédie musicale sur la vie de Louis II de Bavière.
Le bâtiment offre une similitude certaine avec le Festspielhaus de Bayreuth, en particulier dans l'aménagement intérieur de la salle avec le parterre en amphithéâtre, des loges et un balcon au fond et la fosse d'orchestre dissimulée. La capacité d'accueil est de 1360 places. La comédie musicale Lusdwig II connut un grand succès de 2000 à 2003, recevant plus d'un million et demi de spectateurs. Mais cela n'empêcha pas la faillite de l'entreprise qu'un deuxième spectacle, toujours sur le roi de Bavière, ne put arrêter.
Depuis 2007, le théâtre a été repris par un groupe d'investissement publique - privé ; il accueille de manière épisodique des spectacles de variétés et des événements festifs. Il mérite incontestablement un futur plus brillant dont le venue de l'Opéra de Sofia pour jouer le Ring est peut être l'amorce. On peut l'espérer, même si l'équipement technique et les conditions acoustiques ne peuvent pas être comparés avec Bayreuth.
En cette fin septembre, Wagner était donc à l'honneur et l'on pouvait voir un peu partout les très belles affiches annonçant l'événement. En ce qui nous concerne, nous n'avons assisté qu'aux deux premiers volets de cette Tétralogie : l'Or du Rhin et la Walkyrie et c'est donc uniquement de ces deux parties dont je vais vous parler maintenant.
Il faut dire d'abord que ce Ring, interprété par le théâtre de Sofia sous la direction du chef allemand Erich Wächter, avec un effectif orchestral réduit à 75 instrumentistes, ne prétendait pas rivaliser avec les grandes scènes internationales. D'ailleurs l'orchestre, qui avait misé sur la simplicité, la délicatesse, la douceur s'en est assez bien sorti, même s'il ne pouvait donner assez de force et de puissance aux grands passages orchestraux,
Les interprètes étaient tous Bulgares et il serait inutile de mentionner les noms de tous ces artistes. Certains rôles étaient malheureusement assez mal tenus, par des chanteurs qui avaient la plus grande difficulté à prononcer correctement l'allemand et très insuffisants vocalement. Si cela n'est pas trop grave pour un Donner ou un Froh, cela le devient davantage quand il s'agit d'Alberich ou de Fricka. Quelques chanteurs cependant ont fait une belle prestation même si le défaut général était un manque de puissance. A leur décharge il faut dire que l'acoustique de la salle n'est pas des meilleures, que la scène, très large et profonde, ne faisait pas vraiment caisse de résonance et que la mise en scène les obligeait souvent à chanter loin du public. Dans l'Or du Rhin, les deux géants ont fait une prestation honorable, ainsi que le Loge de Daniel Ostretsov qui, sans être un grand chanteur avait un timbre agréable, une bonne diction et une aisance scénique intéressante. C'est le Wotan de Martin Tsonev qui fut indiscutablement le meilleur. Sa voix est belle, bien timbrée, mais il lui manque hélas un peu de puissance. Comme acteur, il nous a donné une belle interprétation du rôle du dieu, dans une mise en scène colorée et parfois amusante mais intelligente et respectueuse de l'oeuvre. Les costumes très colorés eux-aussi et souvent un peu "bizarres" étaient cependant en accord avec cette mise en scène (due à Plamen Kartaloff, le directeur de l'Opéra de Sofia) qui, pour certains passages, frisait la parodie. Il faut aussi mentionner des Filles du Rhin athlétiques qui durant toute la première scène se sont livrées à des sauts sur un trempoline ce qui s'accordait parfois assez mal avec le chant.
Voici quelques photos d'artistes au moments des saluts :
Loge
Erda
Wotan, Alberich, Freia et Donner
Pour la Walkyrie, nous eûmes une très agréable surprise avec les deux interprètes de Siegmund et Sieglinde. Martin Ilev, Siegmund, est un excellent chanteur à la belle et robuste voix qui donna une très bonne interprétation de son rôle. Il est vraisemblable que cet artiste, encore jeune, fera une carrière internationale. Quant à la Sieglinde de Tsvetana Bandalovska, elle fut elle aussi excellente. Sa voix fraîche était tout à fait en rapport avec son rôle mais elle manquait cependant de force. Brünnhilde n'avait rien d'exceptionnel et si ses hoyotoho furent vigoureux et puissants, sa voix manquait de souplesse et de finesse. Ce fut toujours Martin Tsonev qui interprétait Wotan, un peu trop piano dans ses monologues du deuxième acte mais émouvant dans les adieux à sa fille. Pour la mise en scène, toujours ce mélange de fraicheur, de couleur et on pouvait juste regretter la banalité du tableau final. Mention spéciale pour les walkyries perchées sur des cônes censés représenter leurs chevaux ; ceux-ci étaient manoeuvrés fort habilement par des machinistes qui les montaient ou descendaient. Habillées joliment de costumes argentés, leur chevauchée déclencha les applaudissements spontanés de certains spectateurs, chose tout à fait rarissime au cours d'un spectacle wagnérien !
Et quelques photos au moment du salut final
Voilà un début de Ring plein de fraîcheur qui nous a changé des interprétations souvent malséantes et prétentieuses qui sont devenues la règle de nos jours. Et même si l'orchestre n'était pas celui de Bayreuh, et même si certains chanteurs n'étaient pas fameux, le tout faisait un spectacle agréable dans le cadre magnifique de cette partie des Alpes bavaroises.